Revitaliser les territoires ruraux : une urgence pour la cohésion sociale
Couvrant 80% du territoire national et abritant 60% de la population (1), les territoires ruraux sont pourtant de plus en plus fragilisés. Fermetures de services publics, déserts médicaux, exode des jeunes générations, précarité économique ont un résultat clair : près d’un habitant de commune rurale sur deux se sent plutôt rejeté par la société française actuelle (2). Mais nous, élus, associations, porteurs de projets engagés pour les communes rurales et les petites villes, nous refusons de nous résigner. La revitalisation de nos environnements quotidiens n’est pas seulement une question de justice territoriale : c’est faire le choix du vivre-ensemble, en luttant contre les fractures sociales et territoriales qui menacent la cohésion de notre pays.
Les territoires ruraux ont longtemps été moteurs de notre économie et de notre identité : ils sont toujours aujourd’hui sources d’engagements et d’innovations. Face aux fractures, nous construisons, expérimentons, partageons des solutions au quotidien, et aux côtés des élus, nous nous mobilisons semaines après semaines, pour renforcer le vivre-ensemble auquel aspirent 77% des Français.
Repartir du local pour créer des solutions durables car co-portées par les élus, les habitants et la société civile
Agir pour « les territoires », c’est avant tout soutenir les initiatives qui animent la vie locale, par le lien social crée et les services de proximité apportés. Services publics, santé, commerces de proximité, lieux de convivialité : la diversité des territoires ruraux impliquent de faire du sur-mesure. Mettre les habitants au 1er plan de la construction de chaque projet nourrit l’engagement collectif, mais c’est aussi une condition de pérennité des solutions. Les initiatives bâties collectivement ont fait leur preuve : elles sont concrètes, adaptées, renforcent le tissu social et mobilisent les forces vives du territoire.
Le succès des « Maisons France Services », ces lieux qui regroupent en un même endroit l’accès aux services publics essentiels, s’explique par son adéquation avec les besoins exprimés localement. Le Groupe SOS participe à ce même mouvement avec l’association 1000 cafés : une initiative qui ouvre ou rouvre des cafés dans les villages de moins de 3 500 habitants, et qui a été soutenue dès sa conception par des acteurs publics, notamment en premier par la Région Occitanie. Soulignons également l’engagement de l’association Andès, qui coordonne un réseau d’épiceries solidaires rurales itinérantes ; de l’association Wimoov, qui oeuvre pour une mobilité durable et inclusive dans les territoires ; de l’initiative Incroyable Territoire, qui propose d’animer des programmes dans les petites et moyennes communes pour libérer les énergies, connecter les talents et offrir à chaque initiative les moyens d’agir et de réussir; ou encore de la fondation FACE, qui fédère entreprises des territoires pour lutter contre toutes les formes d’exclusion. Mais il faut aller plus loin : chaque projet, qu’il soit économique, écologique ou social, doit être le fruit d’une concertation étroite avec celles et ceux qui vivent dans ces territoires.
Simplifier l’accès aux financements pour les porteurs de projets créateurs de lien social
En soutenant les initiatives locales, comme les cafés associatifs, les tiers-lieux, les boutiques et ateliers partagés ou les activités intergénérationnelles, nous combattons l’isolement et le repli sur soi qui alimentent les inégalités et les tensions. Recréer des espaces de dialogue, du faire ensemble et de rencontres permet non seulement de renforcer le tissu social, mais aussi de bâtir une communauté résiliente et solidaire. Le lien social est un levier pour construire une société où chacun trouve sa place, quelle que soit sa situation géographique ou économique.
Redonner vie aux territoires ruraux ne sera pas possible sans un véritable pacte national, qui commence par un choc de simplification de l’accès aux financements publics de soutien à la ruralité. Alléger les démarches administratives, permettre plus d’agilité dans l’adaptation des dispositifs, c’est offrir aux élus, entrepreneurs, associations et habitants la possibilité d’expérimenter, d’innover et de bâtir des solutions sur mesure.
C’est pourquoi, nous appelons à la création d’une conférence des financeurs avec une logique de guichet unique, telle que proposée par la Délégation aux collectivités territoriale du Sénat (3), qui mutualiserait et rendrait fongible les dispositifs de soutien à l’ingénierie et à l’équipement en milieu rural pour la création et le soutien des lieux de convivialité. La souplesse d’un tel dispositif, inspiré de la conférence des financeurs du CNSA à destination des personnes âgées, ou mis en place dans le secteur de l’insertion professionnelle (4), permettrait un accompagnement plus efficace qui réunit l’ensemble des financeurs publics autour d’une table.
Aujourd’hui, une grande partie des projets portés par des associations en ruralité ne sont pas financés pour cause d’obstacles administratifs : barrières à l’entrée trop hautes, temps d’instruction trop long … Cette inefficacité ne peut plus durer.
Revitaliser nos territoires ruraux est une priorité nationale qui doit mobiliser des moyens financiers, mais aussi humain. Revitaliser les territoires, c’est revitaliser notre société tout entière.
Signataires :
- Jean-Marc Borello, Président du Directoire du Groupe SOS ;
- Jacques de Lemps, Maire de Cottance ;
- Jean-Pierre Bouquet, Maire de Vitry-le-François ;
- Grégory Villafranca, Maire de Saint-Laure ;
- Dany Michaud, Maire de La Foye-Monjault ;
- Philippe Goyaud, Maire de Villognon ;
- Patricia Laborde, Maire d’Aspin-en-Lavedan ;
- Catherine Pravin, Adjointe au Maire de Canaules-et-Argentières ;
- Gérald Rousselot, Adjoint à la culture, Commune d’Aix-Villemaur-Pâlis ;
- Alain Fontaine, Président de l’Association des bistrots et cafés en France ;
- Agnès d’Anthonay, Présidente de la Fondation Brasseries Kronenbourg ;
- Graffi Rathamohan, Présidente de l’association Incroyable Territoire ;
- Loïc Latour, ex-PDG de France Boissons ;
- Yann Auger, Directeur Général de l’association Andès ;
- Florence Gilbert, Directrice Générale de l’association Wimoov ;
- Antoine Jouteau, Directeur Général de leboncoin ;
- Camille Dael, Directrice YSOS Orne, Van Plurielles 61 ;
- Alexandre Jost, Délégué général, La Fabrique Spinoza ;
- Sandrine Plancke, Fondatrice du podcast Les Nouvelles filles de la Campagne.;
- Chloé Brillon, Présidente de l’association 1000 cafés .
